On devine chez beaucoup de commentateurs la tentation de rapprocher les manifestations anti-CPE d'aujourd'hui du mouvement des banlieues de novembre dernier. Le sociologue François Dubet parlait il y a quelques jours de réplique. Ces mouvements se font naturellement sur même fond de chômage, de fin de règne d'un pouvoir dont les modes de prise de décision ne sont plus adaptés. Mais les confondre serait une erreur. Ces deux mouvements obéissent à des logiques différentes.
Le mouvement des étudiants et lycéens a des objectifs, des porte-parole, en un mot une approche politique de la situation. La révolte des banlieues se situait dans une logique différente : sans revendications ni leaders, les jeunes de novembre dernier, ceux de ces jours-ci ne manifestent pas, ils se battent, agressent les manifestants, les policiers, mettent le feu à des voitures. Ils n'ont aucune revendication affichée, aucun leader ni porte-parole et pas d'autre ambition que de multiplier les "exploits" (pavé lancé sur un flic, vitrine brisée, téléphone portable volé…).
Comme je le disais dans un précépent post, ces deux mouvements peuvent se soutenir mutuellement : la crainte d'une nouvelle explosion des banlieues peut amener les pouvoirs publics à reculer sur le CPE (c'est, en tout cas, ce que demandent les Présidents d'universités et les proviseurs) ; la crainte d'une bavure qui frapperait un lycéen peut inciter les policiers à agir avec mesure contre les casseurs. Mais ils sont très différents. Et doivent être traités à part.
Le problème des jeunes de banlieue est, pour l'essentiel, lié à l'exclusion scolaire, à l'incapacité du système scolaire à insérer une partie de la jeunesse pauvre dans un parcours qui leur permette d'envisager avec un peu de bon sens les risques qu'ils prennent en s'en prenant à des vitrines, à des policiers, à d'autres jeunes…
Celui des anti-CPE est lié au marché du travail, à l'incapacité du monde économique à accueillir dans des conditions acceptables les jeunes sortis du système scolaire.
Un blog créé à l'occasion de la sortie de mon livre Banlieues, insurrection ou ras le bol, pour discuter de ce qui s'est passé en novembre 2005
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