Un ami me demandait, tout récemment, de résumer mon livre "qu'il aimerait tant lire", ce qui voulait sans doute dire qu'il ne le lirait pas. C'est naturellement à peu près impossible (après tout, si j'ai écrit 130 pages, c'est qu'il les fallait bien), je me suis donc contenté d'extraire une des thèses que j'y développe. Voici ce que cela a donné :
- la banlieue est comme ces colonnes de distillation qui séparent le pétrole en toute une série de produits qui vont des bitumes (les produits les plus lourds qui restent en bas de la colonne) jusqu'aux plus légers comme le kérosène et les carburants que l'on utilise dans l'aviation. De la même manière les banlieues sont un espace dans lequel s'effectue un tri entre, d'un coté, des gamins qui risquent de finir dans le lumpen proletariat comme le décrivait Marx, et de l'autre, des gamins qui vont former une nouvelle bourgeoisie à la Weber,
- la ligne de partage est la carrière scolaire : il y a d'un coté, les exclus de l'école, ceux que l'on retrouve dans les sections professionnelles et, de l'autre, ceux qui suivent des carrières scolaires normales,
- ce qui distingue les enfants des banlieues de ceux des autres quartiers est que le choix de cette carrière scolaire leur revient alors que dans d'autres milieux, ce sont les parents qui prennent les décisions,
- ce transfert de la décision des parents aux enfants tient, non pas à la pauvreté, mais à l'érosion des méthodes éducatives dans des milieux extrêmement hétérogènes que sont nos banlieues. A l'inverse de ce qui se passe aux Etats-Unis ou en Grande-Bretagne, les quartiers ne sont pas organisés par ethnies. Ce qui évite les conflits ethniques et le racisme (c'est donc un avantage), mais autorise les enfants à contester l'autorité parentale (pourquoi me demandez-vous de faire cela alors que les voisins ne le demandent pas à leurs enfants?).
- les enfants qui choisissent très jeunes la carrière scolaire doivent faire preuve d'un formidable ascétisme (il faut décider par soi-même de travailler plutôt que d'aller jouer au foot avec les copains), or cet ascétisme est très proche de celui que Weber a analysé dans ses études sur l'esprit protestant.
Ce qui permet de dire que les banlieues sont l'avenir de notre société pour le meilleur (cette nouvelle bourgeoisie est dynammique) et le pire (le lumpen proletariat). Les objectifs d'une politique devrait donc être d'éviter tout ce qui peut contribuer à favoriser le développement du lumpen proletariat : les mécanismes d'exclusion à l'école mais aussi la précarité dans l'emploi qui incite à ne travailler que lorsqu'on ne peut pas faire autrement.
Un blog créé à l'occasion de la sortie de mon livre Banlieues, insurrection ou ras le bol, pour discuter de ce qui s'est passé en novembre 2005
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